Côlon (Cancer du)
Tumeur maligne développée à partir de la muqueuse du côlon ou du rectum, le cancer colorectal entraîne dans le monde près de 500 000 décès par an, soit autant que le cancer du sein. Il est en Europe occidentale et en Amérique du Nord le cancer digestif le plus fréquent. Dans ces régions, il constitue dans les deux sexes la troisième cause de mortalité par cancer (après le cancer du poumon et de la prostate chez l’homme, après le cancer du sein et du poumon chez la femme). On en compte environ 25 000 nouveaux cas par an en France. Le rôle de l’alimentation comme facteur étiologique a été évoqué : on meurt moins de cancer colorectal dans les régions où l’on consomme moins de graisse animale et plus de fibres végétales ; par ailleurs, les populations japonaises émigrées aux États-Unis acquièrent en une génération le risque élevé de cancer colorectal des Américains natifs. Cependant, les études récentes n’ont pas montré d’effet protecteur des fibres sur le développement du cancer du côlon.
Une prédisposition génétique est rarement reconnue : la poly-adénomatose familiale est responsable de moins de 1 % de l’ensemble des tumeurs coliques ; il s’agit d’une affection familiale à transmission autosomique dominante caractérisée par la présence au niveau du côlon et du rectum et parfois sur l’intestin grêle et l’estomac d’une myriade de polypes évoluant inéluctablement vers la transformation maligne. Il est maintenant établi que les patients porteurs de cette affection ont hérité d’une mutation dans le gène APC (pour Adenomatous Polyposis of the Colon). Le cancer colorectal héréditaire non polyposique (encore appelé syndrome de Lynch) compte pour environ 5 à 10 % de l’ensemble des cancers coliques ; il survient également sur un mode autosomal dominant, de préférence chez les femmes et avant 45 ans.
Dans la plupart des cas (67 à 90 %), le cancer colique résulte de la transformation maligne d’un polype adénomateux bénin. Au plan anatomo-pathologique, c’est un carcinome glandulaire (ou adénocarcinome) qui bourgeonne dans la lumière du tube digestif et infiltre successivement les différentes couches de la paroi du côlon avant d’envahir les ganglions lymphatiques et/ou les structures anatomiques voisines. La tumeur peut envoyer des métastases à distance, principalement dans le foie mais aussi dans le poumon, les os et le cerveau. La cavité péritonéale et les lignes de suture digestive peuvent être le siège de l’implantation de cellules malignes essaimées à partir de la tumeur primitive.
Le cancer colique est souvent longtemps asymptomatique et son diagnostic est posé lors d’un dépistage ou d’un examen réalisé pour un autre motif. Les symptômes les plus fréquents sont des douleurs abdominales qui accompagnent des modifications du transit digestif (diarrhée, constipation ou alternance de constipation et de diarrhée). Le saignement de la tumeur se traduit par l’émission de sang rouge mêlé aux selles (qu’il faut se garder d’attribuer sans contrôle à l’existence d’hémorroïdes !) ou par des selles noires (présence de sang digéré). Parfois, l’hémorragie ne se révèle que par la mise en évidence de sang occulte dans les selles ou par une anémie chronique. Rarement, la tumeur se révèle par la présence d’une masse abdominale, d’un amaigrissement ou de température. Dans 20 % des cas, la première manifestation du cancer du côlon consiste en une obstruction intestinale (occlusion). Le diagnostic se fonde essentiellement sur la coloscopie qui permet la localisation de la tumeur et le prélèvement d’une biopsie. La mise au point peut être complétée par une radiographie du gros intestin (lavement baryté). La tomodensitométrie (scanner) détermine l’extension de la tumeur en dehors de l’organe. Le dosage de marqueurs tumoraux (antigène carcino-embryonnaire, CA 19-9) n’a pas de valeur diagnostique ; il constitue une valeur de référence utile en vue de la surveillance ultérieure du patient opéré. Le traitement du cancer du côlon est essentiellement chirurgical (Figure) et consiste en l’ablation du segment de gros intestin porteur de la tumeur (colectomie droite ou gauche), traitement proposé dès 1827 par le chirurgien français Jean-François Reybard (1790-1863). L’exérèse à visée curative emporte les ganglions lymphatiques susceptibles d’être envahis par des (micro)métastases.
Le pronostic dépend de la pénétration de la tumeur dans la paroi colique (classification de Dukes – proposée par ce médecin anglais en 1932 – ou dérivées) : le taux de survie à 5 ans est supérieur à 85 % si l’extension de la tumeur est limitée mais s’effondre à environ 30 % en cas d’envahissement tumoral des ganglions lymphatiques. Dans ce dernier cas, l’administration d’une chimiothérapie adjuvante comportant du fluorouracile et un agent modulateur tel que le lévamisole ou l’acide folinique a été démontrée efficace pour réduire le risque de récidive et augmenter l’espérance de vie.
Les métastases hépatiques, si elles sont peu nombreuses, peuvent parfois être réséquées chirurgicalement ou détruites par le froid (cryoablation) ou par application de radiofréquences. Dans le cas contraire, les schémas modernes de chimiothérapie (dérivés du platine, etc.) procurent bien souvent des rémissions remarquables et une qualité de vie très satisfaisante.
Voir aussi Moshé Dayan, Ronald Reagan.