Santé mentale
Le sport, une arme contre l'addiction?
The Canadian Press
Par Lauran Neergaard, ASSOCIATED PRESS
11 juin 2008
WASHINGTON - On sait que le sport affine la taille, qu'il est bon pour le coeur et pour les os. Mais est-il aussi, comme on le prétend, efficace dans la prévention des addictions? C'est la question que se pose le gouvernement américain qui intensifie la recherche dans ce domaine.
Il n'est bien sûr pas question de transformer toute la population en sportifs de haut niveau. Mais juste de comprendre comment une activité sportive régulière d'intensité variable (danse, vélo, natation...) agit sur l'humeur, la performance et même le système de récompense, système cérébral qui peut être détourné au profit d'une substance à accoutumance.
Le Dr Nora Volkow, directrice de l'Institut national des toxicomanies, est partie des résultats d'une étude selon lesquels les enfants et adolescents pratiquant une activité sportive quotidienne étaient deux fois moins susceptibles de fumer que les autres, et présentaient 40% moins de chances d'essayer la marijuana.
Ses 10 km de footing quotidien et ses connaissances scientifiques avaient déjà convaincu Nora Volkow des bienfaits du sport sur le cerveau. On sait que l'exercice physique améliore la fabrication des neuromédiateurs, ceux qui détectent et renforcent le plaisir.
"Chez les enfants, c'est inné", souligne-t-elle. "Ils veulent bouger." Mais les enfants américains sont de plus en plus sédentaires, comme le montre l'épidémie d'obésité, "le temps passé devant les écrans" remplaçant celui passé à jouer dehors, tandis que les heures de sport à l'école ont diminué. Et à l'approche de l'adolescence, courir dans le jardin, qui était un jeu, devient souvent une corvée.
"Pourquoi perdons-nous la capacité à éprouver du plaisir en faisant de l'exercice physique?", s'interroge le Dr Volkow. La semaine dernière, elle a convié plus de 100 spécialistes du sport et de neurobiologie à deux jours de conférence, pour étudier le potentiel de l'activité physique dans la lutte contre la toxicomanie. Et annoncé que quatre millions de dollars (2,5 millions d'euros) allaient être accordés aux recherches en ce domaine.
Les programmes de désintoxication comprennent souvent du sport, en partie pour distraire les patients de leur obsession, mais il existe peu d'études sur les effets.
D'ailleurs, en amenant des fumeurs dans une salle de gymnastique trois fois par semaine, l'Université Brown a découvert qu'ajouter de l'exercice à un programme de sevrage tabagique multipliait par deux les chances de décrocher, du moins chez les femmes. De plus, les ex-fumeuses sportives prenaient deux fois moins de poids que les autres, selon le Dr Bess Marcus, qui a conduit cette recherche et mène une étude plus importante pour établir la preuve de ce bénéfice.
Peut-on aller jusqu'à faire de l'exercice physique un outil de prévention? En tout cas, les rats disposant d'une roue pour courir dans leur cage sont moins enclins à consommer des amphétamines, ce qui suggère que l'exercice stimule le centre de la récompense dans le cerveau et les rend moins vulnérables au plaisir associé à la drogue.
Chez l'homme, l'exercice agit comme un antidépresseur léger et soulage le stress. La dépression, l'anxiété et le stress augmentent le risque d'alcoolisme, de tabagisme et de toxicomanie.
Le Dr Volkow pour sa part remarque que les troubles de l'attention et l'obésité sont liés à des problèmes de dopamine cérébrale, un système que les drogues détournent pour engendrer l'addiction.
Les bébés singes qui ne jouent pas assez pendant l'enfance contrôlent mal leur agressivité en grandissant: les plus agressifs ont tendance à présenter une anomalie liée à la sécrétion de sérotonine, le neuromédiateur du bien-être, et absorbent des grandes quantités d'alcool si on leur en offre.
Chez les rats, l'activité physique augmente la production des facteurs de croissance et des cellules souches dans des régions clés du cerveau pour l'apprentissage et l'humeur. Elle augmente la formation des vaisseaux sanguins, et renforce les réseaux de communication entre cellules cérébrales.
Mais tout cela ne suffit pas à savoir si l'exercice a vraiment une influence sur la toxicomanie, ont estimé des scientifiques participant à la conférence.
Source: http://www.santecheznous.com/channel_health_news_details.asp?news_id=211&news_channel_id=33&channel_id=33&relation_id=43107